holly wood died. (freddie)

LIVERPOOL 3-0.
Liverpool était sur une bonne série, une série de 24 matchs sans défaite. Ma mère, elle, criait à s’en arracher les poumons. Son coeur claquait contre sa poitrine, s’emballait alors que je cherchais la vie. Enfin. Après neuf mois. Ma mère m’a donné la vie, moi j’ai donné la mort. Ma soeur est morte quelques minutes plus tard. Une malformation cardiaque je crois. Alors ma mère m’a porté à bout de bras et elle a pleuré. Seule. Et elle a appelé mon père. Une fois, deux fois, trois fois. Deuxième but de John Barnes. Les supporters reprennent espoir, mon père également. Ma mère, elle, désespère, seule, épuisée, endeuillée. Elle le déteste. Elle se demande où il est et comment il peut délibérément la laisser sans nouvelle. Son père avait peut-être raison. Il profitait peut-être de sa trop grande bonté. Quand elle l’avait rencontré - il y a de ça deux ans - il n’était rien de plus qu’un restaurateur au chômage depuis plus de dix mois. Désormais, il avait son propre restaurant. Mon grand-père arrive pour enfoncer le clou. Ma mère tente de faire bonne figure. Les reproches fusent, le ton monte et mes pleurs s’intensifient. Mon grand-père m’ignore, ma mère aussi, mon père aussi. Trevor, mon cousin, se penche au-dessus de moi avec un large sourire. Le premier de ma rocambolesque existence.
DISORDER.
« Tu ne pouvais pas faire dans la restauration comme ton père ? Non ! Bien sûr que non ! Monsieur veut devenir musicien ! » Il m’ennuyait. Toujours la même histoire, toujours le même problème. Je devais me plier à ses attentes, reprendre le flambeau, apprendre le métier. La bouffe. J’ai haussé les épaules, insolent gamin rêveur et capricieux. Je voulais faire de la musique, je voulais en vivre, je voulais parcourir le monde avec Kalhen. « Freddie. Tu n’y arriveras pas. » Comme toujours, il cherchait à me décourager. Il savait que j’étais bon mais non, je ne pouvais pas en faire mon métier à ses yeux. Ma mère était de son avis malheureusement, tout le monde. J’étais seul contre tous. Je suis remonté à l’étage, je n’avais pas à me justifier. J’ai allumé la radio dans le garage familiale, il passait un vieux Joy Division. Mon préféré, Disorder, ironie du sort. J’ai augmenté le volume exagérément. J’aimais les années 70, plus encore que mes parents. Je me suis étalé sur un canapé défoncé avant de m’allumer une clope, j’ai regardé ma batterie avec peine. J’étais un Vega, un Vega ne plie pas, jamais. L’école n’était plus, au risque de passer le reste de ma vie à bosser au Tesco du coin.