Me balader dans Londres, c’est pas quelque chose pour laquelle j’éprouve beaucoup de plaisir. Ou du moins, pas le soir. En journée, ça reste sympa puisque ça serait carrément hypocrite de dire que cette ville est moche et désagréable. J’ai appris à m’y habituer, à connaitre les coins et recoins et à comprendre un peu plus l’esprit anglais. Aujourd’hui, je crois que si on me demandait pour retourner vivre en Espagne, je ne serais plus aussi partante, peut-être simplement parce qu’ici il y a Aël et pas en Espagne. Probablement que certains pourraient me prendre pour une naïve, ou un cœur d’artichaut, mais au fond c’est pas très important puisque moi je sais ce qu’il en est vraiment. C’est vrai que ça ne fait pas un an, mais est-ce le plus important ? Pourquoi n’aurait-on pas le droit d’aimer autant qu’un couple formé depuis 5 ans ? Moi, en tout cas, j’y crois. Sur le chemin, j’ai vissé les écouteurs dans mes oreilles et me concentre sur la musique, comme sur ce qui se passe autour de moi. Dans le métro, j’observe les gens, leur manière de s’habiller ou de se comporter et puis je me concentre sur l’extérieur en attendant l’arrêt me menant au domicile de ma maman.
D’après ses dires, elle revenait dans l’heure des Etats-Unis et l’idée de rester chez mon père en rentrant des cours, toute seule, à ne rien faire, me laissait perplexe. Ca faisait une semaine que je n’avais plus vu ma mère et l’idée de savoir comment s’est passé son voyage, tout comme l’envie de lui raconter ma petite vie était une envie que je voulais. J’ai pas vraiment honte de dire que oui, ma maman m’avait manquée. En rentrant chez mon père, je fus accueillie par Shiva que j’empresse de caresser, comme à peu près tous les jours. J’imagine bien sa joie de ne plus se trouver toute seule et pourtant, je compte bien l’emmener avec moi chez ma mère : non seulement ça lui fera prendre l’air et puis je n’ai pas envie de la laisser toute seule à peine rentrée. De plus, là-bas il y a un jardin et elle pourra toujours s’y défouler un peu. Sans même déposer mon sac de cours ni enlever ma veste et mon foulard, j’attrape la laisse pour ressortir aussitôt. Sur le chemin, j’envoie un message à mon père pour le prévenir et décide de passer par les parcs et d’opter pour une longue balade plutôt que de la jouer timing en empruntant le métro.
Dans la rue de ma maman, Shiva tire beaucoup moins, je crois qu’elle commence à fatiguer, tout comme j’ai hâte moi aussi d’arriver. Au moins, on aura pris un bon bol d’air et probablement qu’on aura même atteint notre nombre de pas recommandés par jour. Arrivée, j’ouvre la porte d’entrée et entre en prenant soin de laisser entrer Shiva également et claque la portière dans ma délicatesse légendaire. En voyant ma mère je souris et m’approche pour l’étreindre. J’enlève ensuite la laisse du chien ainsi que ma veste et m’empresse de servir un bol rempli d’eau pour Shiva « Oui ça va. Non du tout, on a fait un grand tour et voilà, on vient d’arriver. Je voulais pas laisser Shiva toute seule encore plus longtemps, du coup je l’ai prise avec moi …» Je regarde ma maman d’un air un peu coupable en me demandant si ça ne posait pas de problème d’avoir pris le chien. Après tout, je ne lui ai même pas demandé la permission, bien que ce n’est pas la première fois. Finalement, je monte à l’étage en prenant soin de suivre ma mère, mais reste peu loquace lorsqu’elle finit par me demander si je me suis encore disputée avec mon père « Non du tout. C’est juste que j’ai pas beaucoup dormi et que ça m’a épuisée la balade ici. C’était bien les USA ? T’as fait quoi ? » Je m’assieds sur le bord de la baignoire « Maman, est-ce que tu crois qu’il y a un âge pour être indépendant ? »