(✰) message posté Mer 2 Juil 2014 - 0:37 par Invité
La journée de Benjamin n’avait pas été des plus plaisantes. C’était son jour de congé, il s’était donc rendu à l’institution où sa mère se trouvait. Il n’avait pas tellement le temps d’y aller les autres jours de la semaine, il était souvent fatigué et surtout, aller là-bas était une épreuve. Voir sa mère perdre son identité progressivement était une longue torture. Elle avait reçu une lettre de Jeff, son oncle qui les avait sauvé d’un père cruel, heureusement que les deux frères étaient bien différent. Il n’avait jamais vraiment su sa mère avait entretenu une relation par la suite avec ce fameux oncle. Après tout les trois ont vécu sous le même toit pendant 10 ans, des liens se créent. Sa mère n’avait pas ouvert pour l’enveloppe, il avait envie de le faire, de la lui lire mais elle ne savait même plus qui s’était. Voilà 12 ans qu’ils ne s’étaient pas vu, ce n’était plus qu’un souvenir embrumé dans un coin de son esprit. Benjamin prit la lettre entre ses mains, il la regarda attentivement puis la reposa. Ce n’était pas son courrier, il n’avait pas à se mêler de leur relation. Lui aussi recevait par moment une lettre, ils échangeaient un peu mais la distance entre la banlieue d’Austin et le centre de Londres n’était pas évidente pour garder contact.
Il resta jusqu’en début d’après-midi quand les médecins passaient voir les patients. Ces derniers n’étaient pas optimiste quant à une amélioration, ils n’était pas non plus défaitiste. Personne ne pouvait savoir ce qu’y allait se passer. La seule chose sûr était que Benjamin allait se retrouver à court d’argent pour payer l’établissement. Quand ses grands-parents étaient en vie, ils m’étaient une partie de leur retraite dans les soins de leur fille, maintenant qu’ils étaient décédés, il ne restait plus que le maigre salaire du garçon. Il allait devoir se résoudre à prendre un deuxième emploi s’il voulait joindre les deux bouts, ou alors se trouver un colocataire pour diviser son loyer. Après la visite des maisons, il partit. Sur son vélo il se balada un peu dans la ville, il aimait bien Londres, les anglais et le temps capricieux. Il était bien ici mais par moment son ranch lui manquait. L’odeur des chevaux, de la terre sèche, les cow-boys et tout le reste. Un jour il économisera suffisamment pour aller faire un pèlerinage nostalgique, en attendant il allait rentrer chez lui se reposer.
Son après-midi fut plus calme, il se roula un joint pour tenter d’oublier un peu sa maladie. Au final, Benjamin fumait surtout pour avoir la tête ailleurs et non par réel plaisir. Il n’avait pas une vie très dure non plus, d’autres personnes étaient tout autant à plaindre. Il avait juste peur de perdre toute sa famille. A propos de famille, il avait envie de voir Emma. Elle était plus âgée que lui de six ans et venait l’été s’occuper des animaux dans le ranch de Jeff. C’était là qu’il l’avait connu, il était tout jeune et malgré son adolescence, elle semblait se soucier un peu de lieu. Elle avait finit par partir en Angleterre et comme le hasard fait bien les choses, Ben l’avait rejoint. Bien que très jolie, il ne l’avait jamais vu comme un potentiel amour. Avec elle c’était différent, il avait l’impression d’avoir une grande sœur, quelqu’un sur qui compter quoi qu’il arrive comme un vrai lien de famille. Évidemment il avait des amis sur qui compter aussi en cas de problème mais en cas de véritable soucis, d’apocalypse ou d’attaque de zombie, il prendrait d’abord des nouvelles d’Emma. Elle connaissait bien les problèmes familiaux de Benjamin, comme lui connaissait les siens et ils se serraient les coudes ensemble. Oui, c’était elle qu’il avait envie de voir. Il lui passa un coup de téléphone, elle était disponible à 19h pour diner ensemble.
Le reste de l’après-midi passa tranquillement, l’idée de voir la jeune femme lui redonna un peu le sourire. Dès 19h ils étaient dans le petit restaurant/snack de Soho que les deux aimaient tant. Elle n’était pas encore arrivée, il récupéra un journal abandonné sur un banc qu’il lut en l’attendant. Emma finit par apparaître. Il posa sa lecture et la prit dans ses bras « Tu m’as manqué ». En réalité il se voyait régulièrement mais la vision de sa mère de ce matin l’avait tout chamboulé. D’habitude il n’était pas un garçon tactile mais avec cette grande sœur d’adoption, il se laissait aller à quelques gestes de tendresse.
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(✰) message posté Jeu 3 Juil 2014 - 16:00 par Invité
Encore une fois, Emma avait passé une très longue matinée. Son réveil avait encore fait des siennes, et elle avait dû une nouvelle fois pédaler à toute vitesse pour rejoindre la bibliothèque où elle travaillait, et où l’attendait une flopée de petits bouts de chou de primaire, qui venait faire leur première visite. Elle leur avait surtout présenté le coin des livres pour enfant, avant de les emmener dans une autre salle – loin de ceux qui étaient venus chercher un peu de silence et de calme pour travailler – où elle leur avait lu un conte d’un pays lointain, l’un de ces livres aux dessins si magnifiques que même les adultes prennent plaisir à les lire. Ces petits monstres étaient sa bulle d’oxygène, et même s’ils pouvaient parfois se montrer très fatigants, elle ne pouvait pas s’en passer. Quelque part, tout au fond d’elle, elle rêvait d’avoir des enfants, et plus elle prenait de l’âge, plus ce besoin se faisait ressentir. Il fallait bien admettre qu’à trente et un ans, elle commençait à se demander si elle arriverait à trouver un jour celui avec qui elle pourrait fonder cette famille qu’elle avait toujours désirée. Depuis sa plus jeune adolescence, elle s’était toujours dit qu’un jour, elle aurait une famille à elle, puisque celle dans laquelle elle avait grandie avait implosé alors qu’elle n’avait que seize ans. Son père était mort, sa mère avait tout fait pour que son demi-frère prenne la porte, et Emma, incapable de lui pardonner, s’était à son tour enfuit du domicile familiale. Certes, elle avait eu des amis sur lesquels compter, certains même qu’elle considérait comme sa vraie famille, sa famille de cœur, mais ils n’étaient jamais que des amis. Ils n’étaient pas du même sang. Non que ce lien soit moins important, mais c’était différent, elle ne pouvait pas le nier. En parlant de famille de cœur, elle reçut un coup de fil de Ben, qui lui donnait rendez-vous à dix-neuf heures le soir même. Elle accepta sans réfléchir, alarmée par le ton de sa voix. Quelque chose n’allait pas, elle pouvait le sentir. Il avait dû rendre visite à sa mère et en sortir encore une bouleversé. Emma connaissait particulièrement bien la vie du jeune homme, qu’elle considérait comme son petit frère. Elle l’avait connu alors qu’il n’avait que dix ans, et qu’il venait de s’installer chez son oncle avec sa mère dans le ranch où la jeune femme avait l’habitude d’aller donner un coup de main pendant les vacances d’été. Ils avaient beau avoir six ans d’écart, elle s’était très vite attachée à cette petite tête frisée qui posait sur elle de grands yeux ahuris. Et puis après tout, ils avaient traversé ensemble les épreuves familiales que le sort leur avait infligées. Lui lorsqu’il avait quitté un père violent, elle lorsque son demi-frère était parti après la mort de leur père. Même lorsqu’elle avait fugué et refait sa vie loin de sa mère, elle était tout de même restée en contact avec Ben. Elle avait été incapable de l’abandonner de la même façon qu’elle l’avait été par Raleigh. Heureusement pour elle, la mère de la jeune femme n’avait aucune idée du lien qui l’unissait au garçon à l’époque, et n’avait donc pas cherché de ce côté-là. Puis le destin l’avait envoyé à Londres, loin de ce frère de substitution. La séparation avait été difficile, mais finalement de courte durée, puisque Ben avait rejoint la capitale Britannique, pour le plus grand plaisir d’Emma. Ils étaient depuis inséparables, se voyant régulièrement, si ce n’est dès qu’ils le pouvaient.
La jeune femme profita de son après-midi de congé pour faire une sieste, car le manque de sommeil commençait à devenir insupportable. Elle était sujette à de récurrentes insomnies depuis quelques mois déjà, ce qui devenait difficile à vivre, surtout au niveau de son travail. Elle s’allongea sur son lit, ferma les yeux, et les rouvrit quelques heures plus tard, se réveillant comme une fleur. Lorsqu’elle jeta un œil à sa montre, elle se rendit compte qu’il était déjà 18h45, et qu’il ne lui restait que quinze minutes avant son rendez-vous. Elle se leva en sursaut, se précipitant dans la salle de bain pour s’asperger le visage d’eau froide, meilleur moyen qu’elle connaissait pour se réveiller. Puis elle partit à toute vitesse sur son vélo en direction de Soho, vers leur restaurant préféré. Elle attacha son vélo à un poteau avant de s’approcher du banc où le jeune homme l’attendait déjà. Lorsqu’il la vit, il se leva et la prit dans ses bras. Emma lui rendit son étreinte avec douceur. Elle avait toujours été très câline, mais avec lui c’était pire que tout. Sûrement à cause de ses bouclettes brunes. « Toi aussi tu m’as manqué. Je suis désolée pour le retard, je me suis endormie pour faire une sieste de cinq minutes qui s’est transformée en un somme de trois heures… » Elle se redressa, le regardant droit dans les yeux, légèrement inquiète. « Mais dis-moi, comment tu vas ? Tu n’avais pas l’air bien au téléphone… »