My silver lining (Felix)

« Je suis Felix Chastain, enchanté de faire votre connaissance. » Felix n’eut jamais pour habitude d’être stressé, bien au contraire. Lui qui ne reculait devant rien, qui parvenait toujours à trouver quelque chose d’encore plus fou à accomplir sans même penser aux risques, qui ne réfléchissait pas et se battait férocement pour monter sur la première marche du podium… Il avait le traque en vue de cet entretien. Une poignée de main distinguée, un sourire quelque peu gêné en face de cet homme impressionnant, en somme quelques banalités ordinaires avant qu’il ne puisse entrer dans son bureau pour discuter un peu de lui. C’était une chance inespérée pour le blond qui avait perdu tout espoir de faire son stage ici au Times alors qu’il n’était qu’en troisième année. Pouvoir se faire une place dans ce magasine était une chose qu’il avait préparé depuis la rentrée, non, il l’avait préparé depuis son arrivée en Angleterre il y a de cela un an et pourtant il s’y était pris trop tard pour envoyer sa demande de stage au magasine qui le refusa d’entrée lorsqu’il se présenta à la porte du bâtiment. Une seconde chance obtenue grâce à quelques relations, la moindre erreur et il était bon pour se trouver un stage de dernière minute dans un petit magasine de moindre renommée. Il prit place sur la chaise qui se tenait devant lui tandis que son interlocuteur s’installa de l’autre côté du bureau. Son regard se posa un instant sur un dossier qui se trouvait posé en évidence entre eux deux. « C’est plutôt rare qu’on décide de recevoir les stagiaires qui n’ont pas eu la présence d’esprit d’envoyer leur demande à temps. Je vois ici que vous êtes français et êtes arrivés ici l’année dernière… Aucun problème de communication ? » Une question tout à fait légitime, ce serait plutôt osé de demander à travailler dans un tel endroit s’il avait quelques lacunes en anglais. Heureusement pour lui, l’anglais était tout comme sa langue natale et il la maitrisait à la perfection. « Je suis bilingue et même si je ne peux pas prétendre parler aussi bien que je le voudrais je n’ai aucun problème problèmes à ce niveau. » Après tout, ses parents estimèrent qu’il était sage d’enseigner l’anglais au même titre que le français à leurs enfants pour qu’ils puissent se débrouiller dans des pays étrangers. Une aubaine pour un amoureux de l’Angleterre tel que Felix.

Après une pause de quelques minutes à scruter le dossier, il releva les yeux en direction du blond prêt à lui poser une nouvelle question sur ses motivations. « Pourquoi avez-vous choisi d’étudier la communication et le journalisme ? » Cette question était prévoyante, mais contre toute attente le jeune homme n’avait pas de réponse bien précise. Il n’était pas comme ceux qui avaient décidés de leur orientation à leur entrée au lycée, il lui a fallu du temps pour trouver sa voie. Encore jeune garçon, Felix voyait les choses en grand. Alors qu’il n’était qu’un gamin complexé par son physique et ses capacités dans la moyenne il trouva à chaque fois un moyen de se démarquer des autres. Il voulait briller en quelque sorte, même s’il devait redoubler d’efforts pour cela. Il le comprit bien rapidement lorsqu’il se rendit compte que dans une famille telle que la sienne, il est difficile pour le petit dernier de ne pas obtenir que les restes, de ne pas être un laissé pour compte. D’une certaine façon ce fut ce qui entretenu sa détermination. Néanmoins malgré toute sa bonne volonté il lui fallut un moment pour trouver sa propre voie. Lui qui avait à l’origine choisi de s’orienter vers les sciences réalisa tardivement que ce n’était pas ce qui lui plaisait réellement et d’une certaine manière il se trouva une passion pour le journalisme sans même s’en rendre compte. « Je ne sais pas vraiment. Pour apporter quelque chose à la société sans doute, permettre de forger es opinions à travers l’information est indispensable. » Il joignit ses mains devant son visage comme s’il était perplexe face aux propos que Felix venait de tenir.

Finalement il ne lui posa qu’une ou deux autres questions de routine avant de clore cet entretien. Il n’avait pas vraiment besoin d’en savoir plus, son dossier parlait de lui-même. Ce ne fut que quelques jours plus tard que Felix obtint une réponse et put commencer son stage au sein du magazine.

« Voici ton maitre de stage, il s’occupera de toi durant les six mois que tu passeras ici. » Felix écarquilla les yeux sous la surprise lorsqu’il découvrit qui allait avoir la charge de lui apprendre les ficelles du métier. Il ne connaissait pas son nom, mais il ne pouvait pas oublier cet air satisfait qu’il avait déjà eu l’occasion de croiser quelques mois plus tôt. Et bien plus encore, il ne pouvait pas oublier la nuit qu’il avait passé en sa compagnie. Il l’avait cherché pendant des jours en vain, cet homme qui lui avait fait tourner la tête lors de leur première rencontre avant de l’abandonner au petit matin. Il était intriguant et inquiétant à la fois, ce regard perçant pouvait mettre mal à l’aise tout comme il pouvait aussitôt mettre en confiance. Un sentiment de confusion que Felix n’avait jamais éprouvé jusque-là et qui le fascinait si bien qu’il en était devenu une sorte d’obsession. [color=#BF2222]« Je pense que je peux te donner mon nom à présent, moi c’est Wren. » Le sourire que le brun lui lança le troubla davantage. Il se souvenait indéniablement de l’étudiant et pourtant il appréciait de le voir devant lui après être disparu de sa vie aussi vite qu’il était arrivé. Ce n’est que lorsqu’ils se retrouvèrent seuls tous les deux qu’il lui montra son vrai visage. « Ne crois pas que ce qui s’est passé entre nous va me rendre plus doux à ton égare, si tu es près à vivre un enfer alors bienvenue parmi nous. Sinon… Tu sais où se trouve la sortie. » Cette honnêteté en était presque effrayante, mais il en fallait plus pour le faire fuir. Il posa ses yeux en direction des siens et lui jeta un regard dur en signe de défi. « Je n'en attendais pas moins. » Wren se rapprocha de lui, l’observant de haut un instant avant d’approcher ses lèvres jusqu’à son oreille. « T’as du répondant, j’aime ça. » Lui qui semblait être à des milliers de kilomètres une minute plutôt se trouvait désormais à quelques millimètres du blond, une proximité gênante et à la fois sensuelle si bien qu’il en eut le souffle coupé. Une dualité troublante à l’image de ce que Felix ressentait à son égard et qui n’annonçait rien de bon. Ce moment ne dura que quelques secondes, cependant c’était suffisant pour raviver davantage ces souvenirs qu’il avait de lui. « Allez, maintenant dépêche-toi de me faire mon café si tu ne veux pas que je te renvoi chez toi. »

Une douce torture commençait alors.