| ( ✰) message posté Sam 17 Oct 2015 - 22:19 par Invité L’eau coulait doucement sur mon corps. Elle était chaude. C’était agréable d’enfin se sentir bien. Pour la première fois en presque un mois, je me sentais soulagée. Dire la vérité. C’était une chose à laquelle je n’étais pas – ou plus – habituée. Je me sentais enfin chez moi. Pourtant, je n’habitais pas là. Et une fois ma douche terminée, je retournerais errer dans les rues de Londres, à la recherche d’un endroit pour passer la nuit. Je ne voulais pas m’imposer à Eugenia. Je n’aimais pas l’idée de lui avoir dit la vérité mais je n’avais pas eu le choix. Je lui devais bien ça, après ce que nous avions enduré ensemble. Et puis, malgré tout, elle restait ma meilleure-amie. Et ça, c’était quelque chose que je ne pouvais oublier. Nous partagions un secret et malgré les années, elle l’avait gardé. Je lui en étais reconnaissante. J’avais une confiance aveugle en la jolie brune. Comment ne pas faire autrement ? Elle était la gentillesse incarnée. Contrairement à sa sœur jumelle qui, elle, était une véritable peste. Après ma sortie de l’hôpital, je n’avais plus eu de contact avec Scarlet. Et c’était tant mieux : elle avait fait de ma vie un véritable enfer. Assise dans la douche, je laissais l’eau couler. Je voulais couvrir mes pleurs pour que personne ne puisse m’entendre. J’étais soulagée, soulagée de me sentir enfin exister, ne serait-ce que pour quelques minutes. Cela pouvait paraître excessif mais c’était probablement l’un de plus beaux moments de ces dernières semaines. L’eau m’aidait à respirer convenablement, même si cela restait difficile. Mes poumons n’en faisaient qu’à leur tête depuis quelques temps. Pouvais-je les en blâmer ? Pas vraiment. Je ne faisais pas attention à ce que je faisais, les maltraitant presque. Je ne prenais pas mes médicaments, je n’allai pas forcément à mes rendez-vous médicaux. Ma vie était un beau bordel et j’étais incapable de m’en rendre compte, trop aveuglée et obsédée par cette envie de vivre la vie au jour le jour. Trop envieuse de ces gens en train de mourir. Cela pouvait sembler étrange pour les gens heureux mais, je haïssais ce qu’était devenue ma vie. Depuis le décès de mes parents et de ma sœur, je ne faisais qu’errer sans but. J’avais l’impression de perdre pied un peu plus chaque jour. Je me noyais doucement, incapable de sortir la tête de l’eau. Et peut-être l’avais-je mérité. Je n’étais pas une bonne personne. Je ne l’avais jamais été. J’étais égoïste. Un brin trop ambitieuse. J’étais manipulatrice, calculatrice. Ma vie n’était qu’un jeu mais j’avais cessé de jouer il y a bien longtemps de cela. J’étais fatiguée. Je voulais simplement me reposer, dormir dans un lit, bien au chaud. Peut-être peindre des tableaux à ne plus savoir quoi en faire, les exposer comme s’ils étaient ma plus grande fierté puis les vendre au prix de ceux de Picasso pour m’assurer la plus belle des vies. Mais la différence entre ce dernier et moi, c’est qu’il était mort. Alors je n’avais plus qu’à attendre de mourir pour devenir riche. C’était un plan macabre et je n’avais aucune descendance. Et je n’étais probablement pas prête d’en avoir. Je n’avais personne. Je n’étais jamais tombée amoureuse. Je ne savais même pas ce que c’était. Et à presque vingt-trois ans, j’étais toujours vierge. Je m’en souciais peu. Je me fichais bien du regard des gens, j’attendais de tomber amoureuse pour pouvoir consommer cet amour. Peut-être étais-je trop fleur bleue. Ou naïve. Ou peut-être les deux. Finalement, je coupais l’eau, sortant de la douche. J’avais laissé mes vêtements dans la chambre d’Eugenia. Je soupirais, dépitée. Je me séchais, passant finalement une serviette autour de mon corps. Je n’étais pas pudique mais j’avais mes limites. De plus, je n’étais pas chez moi et je n’avais pas envie de tomber sur qui que ce soit. Après un instant d’hésitation, j’ouvrais la porte, tombant nez à nez avec Eugenia. Ou plutôt, son sosie. Un peu abasourdie, j’observais la personne en face de moi. Mes yeux tombèrent sur le ventre bien arrondi de cette dernière et je manquais de m’étouffer. Soit Eugenia avait mangé énormément le temps de ma douche, soit je me trouvais face à une Scarlet enceinte jusqu’au cou. Scarlet. Mes yeux s’écarquillèrent et alors que j’allais faire volteface pour refermer la porte et m’enfermer dans la salle de bain, j’en lâchais ma serviette dans un geste maladroit, me retrouvant complètement nue face à la personne que j’avais profondément détesté des années auparavant. Pourquoi fallait-il que cela m’arrive à moi ? |
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