we got scars on our future hearts. (Selena)

Je porte le téléphone à mon oreille et j'attends. J'attends ce qui me semble être des heures et pourtant seulement deux voir trois secondes sont passées. Je vais devenir folle, je ne tiens plus en place. À peine, j'entends son souffle à l'autre bout du fil que je ne lui laisse même pas le temps de dire quoi que ce soit. « Caleb ? Cal il faut que tu viennes… » Il ne doit pas comprendre ce qu'il se passe, et je dois juste l'inquiéter plus qu'autre chose. Et... « Lena, Lena calme-toi, qu’est-ce qu’il y a ? » Mais c'est plus facile à dire qu'à faire. « C’est Jonah Cal, c’est Jonah il… il m’a… » Je m'arrête. J'ai du mal à mettre un mot sur ce qu'il vient de faire. Ou plutôt, je ne veux pas. Ça paraîtrait encore plus réel que ça ne l'est. « Quoi, il a fait quoi Jonah ? Il t’a fait du mal ? » Oh Caleb, si tu savais à quel point il me fait souffrir en ce moment même. Tu lui en voudrais autant qu'à moi si tu pouvais ressentir, ne serait-ce, qu'un quart de mon mal, j'en suis certaine. « Plaquée, plaquée il m’a plaquée. » Je balance assez rapidement comme pour pas entendre ces mots sortir de ma bouche. « Lena, calme-toi, je ne comprends rien. » Je marque une pause de plusieurs secondes. J'essaie de me calmer et surtout de stopper ces maudites larmes qui ne veulent pas s'arrêter de couler. Je prends une grande inspiration et je me lance. Pas aussi calme que je l'aurais voulu cependant. « Jonah m’a quittée, il m’a plaquée, larguée ! Il faut que tu viennes, j’ai besoin de toi ! » Je fais les cent pas dans ma chambre, je n'arrive pas à rester en place. « J’arrive, je suis sur la route. Mais s’il-te-plaît calme-toi. Dans dix minutes je serai là, ça va aller ? » « Je… Je crois… Il m’a plaquée Cal, comme une merde… » Je me répète, encore et encore. Ça semble bien trop réel d'un coup. « J’arrive Lena, j’arrive. » Je ne réponds rien et je m'effondre sur mon lit en attendant l'arrivée de mon grand-frère. Je jette un œil à mon téléphone toutes les deux secondes dans l'espoir d'un quelconque message. Mais rien. Il ne m'affiche que l'heure et le souvenir d'un moment bien trop heureux pour être vrai. Je suis stupide. Je suis stupide d'avoir cru en une histoire qui était bien trop belle pour être vraie. Elle était vouée à l'échec depuis le début, mais trop amoureuse et trop aveuglée, je n'ai rien voulu voir et j'ai continué tête baissée. Jonah n'a jamais été amoureux de moi, on me l'a dit maintes et maintes fois. Mais je me disais, ou plutôt me persuadait, qu'ils étaient juste jaloux de notre histoire et de notre bonheur. Ils étaient jaloux de tout ce que nous vivions et... N'importe quoi. J'aurais dû les croire, surtout ma meilleure amie. Je regarde par la fenêtre, la voiture de Caleb n'est pas encore là. Mais il ne devrait plus tarder je pense. J'ai l'impression que je vais devenir folle avant qu'il n'arrive. Je jette un dernière fois un coup d’œil à mon téléphone, ça fait à peine cinq minutes que l'on a raccroché, patience Selena. Mais je ne connais pas la patience. Je pourrais même dire que c'est mon pire ennemi tellement j'ai horreur de ça. J'essaie de m'occuper l'esprit, et pour ça, j'attrape mon journal. Je vais écrire, ça, ça va me faire du bien tiens.
« Désolée Journal, aujourd'hui, je ne vais pas commencer par ces deux mots qui se trouvent au début de chacune de mes interventions. Je n'ai pas le cœur à ça. Mais j'ai besoin de t'en parler, j'ai besoin de t'écrire tout ce qui ne va pas, toute ma colère et ma rage contre Jonah. Parce que oui, Journal, c'est terminé entre lui et moi. Si tu savais comme j'ai mal, comme j'ai envie de lui balancer les pires mots du monde à sa figure juste pour qu'il ait autant mal que moi en ce moment. Et encore, je ne suis pas sûre que ça lui fasse quelque chose. Ce garçon n'a pas de cœur. C'est une horrible personne, la plus horrible que je connaisse. Et merde, Journal, j'ai beau essayé de me persuader que je le déteste du plus profond de mon être, je ne peux m'empêcher de constater que mes sentiments amoureux sont toujours là, qu'une part de moi est toujours dingue de ce gars. Non, je ne veux pas de ça. Je veux qu'il quitte ma vie à jamais et faire comme s'il n'avait jamais existé. C'est trop demandé ? Cupidon, aide-moi. Retire-moi ces putains de sentiments qui n'ont rien à faire là. Jette-les, brûles-les, vends-les sur ebay si ça te chante, fais-en ce que tu veux, mais je veux que tu les éloignes de moi. À tout jamais. »
J'entends les pas de ma mère dans les escaliers. J'essuie rapidement mes larmes pour ne pas qu'elle se doute de quelque chose si jamais elle vient dans ma chambre, et je saute dans mon lit pour faire semblant de dormir. La porte s'ouvre doucement pour ne pas me réveiller certainement et des sanglots se font entendre. J'essaie de ne pas réagir, mais je dois avouer que ça m'inquiète venant de ma mère. Elle qui ne pleure jamais en temps normal. C'est vrai, je ne l'ai jamais vu pleurée une seule fois au cours de ma vie. « Selena... ? » Ma maman me secoue doucement et je me tourne presque de suite vers elle. Ses reniflements me font peur. J'ai peur de ce qu'elle va me dire, de ce qu'elle va m'apprendre, que je n'ai même pas envie de savoir tout compte fait. « Maman ? Pourquoi tu pleures ? Qu'est-ce qu'il y a ? Il y a un problème ? Dis quelque chose, ça m'inquiète... » Je parle trop, mais j'angoisse. Et quand j'angoisse, je suis un vrai moulin à paroles. Je ne laisse même pas les personnes en face de moi dire quoi que ce soit, comme maintenant. Je le sens prendre ma main dans la sienne, et je la serre très fort pour l'inciter à parler. Voir ma mère dans cet état me fait mal au coeur, et mes larmes coulent de nouveau. Mais pas pour les mêmes raisons cette fois-ci. « C'est Caleb ma puce... Il... Il a eu un accident de voiture... » Caleb. Accident. Voiture. Ses mots résonnent dans ma tête et me font un mal de chien. C'est impossible, il ne peut pas. « Il va bien ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? On peut le voir ? » Je savais que ce n'était pas normal qu'il mette autant de temps à arriver. Il fait toujours en sorte d'arriver rapidement quand je l'appelle. C'est de ma faute cet accident. Si je ne l'avais pas appelé pour venir, jamais cet accident ne serait arrivé et... J'espère qu'il n'a rien de grave, je m'en voudrais jusqu'à la fin de mes jours sinon. Ma mère me caresse doucement les cheveux. Elle essaie de me calmer, mais c'est impossible maman. Je ne pourrais pas me calmer tant que je ne l'aurais pas vu, et tant que l'on ne m'aura pas dit qu'il va bien. « Je ne sais pas Selena, mais on ira demain matin à la première heure, d'accord ? Le médecin m'a dit qu'ils avaient des examens à lui faire passer et que ça risque de prendre un moment... » Je baisse la tête et me mordille la lèvre pour ne pas fondre en larme. Je dois rester forte. Pour lui et pour le reste de ma famille. Mais le problème, c'est que je ne suis pas forte, je ne l'ai jamais été et je ne pense pas que je le serais un jour. Ce n'est pas quelque chose que j'ai hérité à la naissance et je ne comprends pas pourquoi. Ma mère me prend dans ses bras et il ne m'en faut pas plus pour que mes larmes ne coulent sans que je ne puisse les arrêter.

« Alayna, il faut que je te parle de quelque chose. » La jeune femme en question relève la tête de son téléphone. « Ça concerne un garçon ? » Je hoche la tête pour confirmer ses paroles. Elle se redresse un peu de la chaise qu'elle occupe et pose son téléphone sur la table du café. « Je suis tout à toi, raconte-moi tout. Il s'appelle comment ? Il a quel âge ? Tu l'as rencontré comment ? Tu es amoureuse ? Il est beau au moins ? » J'éclate de rire face à ce questionnaire que je voyais venir à des kilomètres. Alayna est comme ça, elle veut toujours tout savoir. Même la chose la plus insignifiante. Et ça peut être énervant parfois, mais c'est comme ça que je l'aime, et je n'ai pas envie qu'elle change ça. « Doucement, laisses-moi en placer une si tu veux tout savoir. » « Je me tais, j'ai compris. » J'attrape la paille de ma grenadine entre mes lèvres et j'en bois une gorgée avant de me lancer. « Ok. Alors, mh... Avant tout, il faut que tu saches que je ne l'ai encore jamais vu. On s'est rencontré sur le net et ça fait quelques semaines, peut-être même mois, qu'on discute. » Elle hoche la tête à mes paroles et m'incite à continuer mon déballage d'informations à son sujet. « Il s'appelle Dorian, il a bientôt 22 ans et vit sur Londres depuis une dizaine d'années je crois. Il est assez différent des autres garçons que j'ai côtoyé tu vois. Je ne sais pas comment t'expliquer, mais il semble plus attentionné, plus mature, plus... Je ne sais pas, plus quoi. » Je marque un petit temps d'arrêt, ne sachant pas si je dois lui révéler l'information presque capitale à son sujet. Ça ne veut rien dire, certes, mais c'est essentiel qu'elle le sache. C'est ma meilleure amie et je n'ai aucun secret pour elle. Je débite mes paroles à toute vitesse, comme si je ne voulais pas qu'elle les entende, ni les comprenne. Et c'est ce que je veux dans un sens. « Ilestencouple et, il partage la passion du théâtre avec moi. » Elle manque de s'étouffer avec son café et son regard se plante dans le mien, comme si j'avais fait la plus grosse bêtise du siècle. « Il est quoi ? Répète un peu. » « Passionné de théâtre comme moi. » Je fais semblant de ne pas avoir compris où elle voulait en venir, parce que je n'ai réellement envie qu'elle me fasse la morale à ce sujet. Et pourtant, je crois que je vais y avoir le droit. « Selena... Je sais très bien que tu sais de quoi je voulais parler. » Je soupire un peu et je me laisse tomber contre le dossier de ma chaise. « Tu as le don de craquer pour les garçons qu'il ne faut pas toi. » Elle marque un point. Elle marque un énorme point. Je ne sais pas, je dois avoir un radar pour ce genre de garçons ou alors cupidon en fait exprès ? Peut-être qu'il essaie de me punir de quelque chose ? Mais de quoi ? Je n'ai pas le souvenir d'avoir fait quelque chose de mal dans mes années passées. Je dois être maudite alors. Je vais finir vieille fille avec mes 99 chats. C'est une belle vie aussi. « Ce n'est pas de ma faute. Je ne choisis pas les garçons sur lesquels je craque. » Et pourtant, j'aimerais bien. Ça m'empêcherait de vivre des ruptures désastreuses et douloureuses. Mais je finirais bien par tomber sur un garçon bien, non ? Qui ne sortira pas avec moi juste comme ça et qui partira au premier obstacle ? Parce qu'une chose est sûre, jamais je ne changerai pour un garçon. Ils peuvent toujours courir. On m'aime comme je suis, avec mes défauts et mes qualités, ou on ne m'aime pas. « Et lui ? De son côté c'est comment ? Il aime sa copine ou bien il en pince pour toi ? » Je hausse des épaules. Je n'en sais rien. Son couple n'est pas au cœur de toutes nos discussions. C'est vraiment pas quelque chose dont j'ai envie de parler avec lui d'ailleurs. Je n'en suis pas amoureuse, mais il me plaît bien et c'est vrai que c'est un garçon avec qui je me vois plus tard. Mais si ce n'est pas réciproque, on ne pourra rien construire lui et moi de toute façon. « Je n'en sais rien. Il est adorable avec moi, il est toujours là quand j'ai besoin de lui et puis, il essaiera toujours de me faire rire quand ça ne va pas et aussi, il n'arrête pas de me complimenter dès qu'il en a l'occasion. Mais voilà, ça ne peut qu'être amical. » Je me redresse et je me cache le visage dans mes mains, et je soupire. Ma vie sentimentale est un vrai foutoir. Ce n'est pas possible de la recommencer à zéro ? S'il vous plaît ? « Pourquoi je ne tombe pas sur une histoire simple pour une fois ? Et qui ne fera souffrir personne ? » Je soupire un peu et j'entends Alayna rire en face de moi. Pourquoi rit-elle ? Il n'y a rien de drôle. Aides-moi plutôt. « Si l'amour était aussi simple, ça se saurait Selly. » Je déteste quand elle a raison, et le pire c'est qu'elle a toujours raison.