(timmy a. austen) « Everybody make mistakes. »

Tucson, c'est là où j'ai grandi. Je suis pas né là-bas, je sais même pas d'où je viens en fait. J'ai été adopté par un couple d'américains quand j'étais encore bébé, et je me souviens de rien avant ça. Je sais seulement que j'ai des origines anglaises. Moi qui déteste les Anglais parce que je les ai toujours trouvé trop pompeux, tu parles d'une ironie. Enfin bref, j'ai grandi dans un ranch, avec pour animal de compagnie un troupeau de bétails, quelques chiens et de la volaille. Je sais grimper à cheval depuis que j'ai deux ans. Mon père adoptif m'a tout appris. Me servir d'une arme contre les coyotes, porter mon colt à la ceinture, et même danser le boogie avec les filles.

J'ai vécu toute ma scolarité ou presque à Tucson. J'y ai passé les plus belles années de ma vie. Les plus belles, et les plus courtes aussi. Ca faisait la troisième famille d'accueil de laquelle je fuyais. Avec mon père, ce vieux Harry, j'ai eu vite fait de comprendre que prendre la tangente ne faisait pas partie de la solution mais du problème. C'est grâce à lui si, quelques années plus tard, à 18 ans à peine, j'ai pu me débrouiller par moi-même. Sa femme, ma mère adoptive était morte en mettant au monde ses deux derniers enfants, mes deux soeurs. Le vieux Harry s'en est jamais remis, et c'est moi qui ai du m'occuper d'elles. Du moins, jusqu'à ce que les autorités et l'assistante sociale débarquent un jour au Ranch et ne découvrent que nous étions depuis trois ans sans parents. J'allais pas causer au risque qu'on me les enlève. C'est pourtant ce qui arrivé. Pile le jour de mon anniversaire, tu parles d'un cadeau. Moi, j'étais trop âgé pour être à nouveau dans une famille d'accueil et de toutes façons, j'y serais pas resté. Mes soeurs par contre, vu leurs âges... bref, on a été séparé. Depuis, plus de nouvelles...

On peut pas dire que ce fut les plus belles années de ma vie. A peine né, j'ai été trimballé de mains en mains jusqu'à ce foutu orphelinat. Je crois même pas qu'il se situait aux Etats-Unis à l'époque. M'en souviens pas. C'était les années floues. Les années où tout le monde me tapait sur les nerfs à me regarder comme le pauvre chiot dont personne ne voulait. Faut dire que j'étais pas non plus le gosse le plus adorable que la Terre ait porté. Les insultes, les coups, les regards noirs, même les soeurs en prenaient pour leur grade. Ah oui, je vous ai pas dit : j'étais dans un établissement catholique. C'était sûrement pour que les p'tits diables abandonnés se tournent vers le seigneur et se rendent compte de la chance qu'ils avaient d'être logés, nourris et blanchis au frais de l'Etat qu'on nous avait placé là. Hey bah moi désolé, mais l'Etat je l'emmerde. Au fond, je crois que j'étais comme les autres gosses, je voulais être aimé pour ce que j'étais. Le problème c'est que j'étais pas comme les autres voulaient que je sois. Et faut faire quoi dans ce cas ? Mentir sur son identité ou se rebeller contre la Terre entière au risque d'être mal-aimé ? J'ai pas choisi la meilleure voie j'crois, même si j'ai quand fini par être adopté. Trois familles d'accueil, jusqu'à mes 10 ans. Ensuite...mais c'est une autre histoire...