You say you don't like it, but girl I know you're a liar

« Bonjour M. Morrison. Asseyez-vous, je vous en prie. »

D'un pas las, Jay exécuta les ordres de son thérapeute. Cela faisait tellement longtemps qu'il recevait des ordres qu'il y alla sans même répliquer quelque chose.

« Merci d'être venu. »

« Ce n'est pas comme si j'avais le choix...»

« M. Morrison, veuillez surveiller vos paroles. Sachez que c'est pour votre bien. »

Il n'en rajouta pas, comprenant qu'il venait de merder. Son avenir reposait sur ces rencontres. Il ne pouvait se permettre de salir encore plus son image. Il devait projeter l'image d'un homme qui regrettait et qui souhaitait changer. C'était vrai, Jay souhaitait réellement changer, mais cela lui demandait énormément d'effort.

« Alors, M. Morisson, comment vous sentez-vous lorsque vous êtes en colère? »

Jay jeta un regard à son agent de libération conditionnelle. C'était comme s'il attendait l'approbation pour parler. En prison, il avait appris à ne pas s'ouvrir aux autres, de ne pas montrer ses faiblesses, sans quoi il deviendrait une proie facile. Son agent acquiesça de la tête, lui faisant comprendre qu'il n'avait pas d'autre choix.

« Et bien, comme n'importe qui qui est en colère...»

« Si c'était le cas, vous ne seriez pas ici... »

Sa jambe tremblait, il avait le regard fuyant. Il n'avait pas du tout envie d'en parler.

« M. Morisson... »

« Quoi?», répondit-il sur un ton plus sec.

Il fronça les sourcils, déjà contrarié par cette question.

« Vous voulez savoir?, dit-il en se redressant, les mains posées sur le bureau devant lui, des menottes les liant ensemble. « C'est comme un feu à l'intérieur de moi. Ça me brûle l'estomac, ça me donne envie de crier. Le seul moyen pour éteindre ce feu est de le laisser sortir, sinon, il fait de gros ravages!». Il s'arrêta lorsqu'il comprit qu'il avait haussé le ton.

Reprend-toi, bon sang ! Tu es ici pour montrer que tu es un type bien...

Jay prit un moment pour se calmer et de laisser les mauvaises pensées quitter son esprit.

« J'ai mal. Ma colère me fait mal. Je peux pas la contenir, elle est plus forte que moi et je... Je... Je dois frapper.»

Quand on est élevé dans une violence quotidienne, il est très dur de s'en débarrasser facilement une fois adulte. Jay a vécu une enfance très difficile, avec des parents qui ne souhaitaient pas avoir des enfants. Des coups, de l'abus physique et verbales, du mépris... Jamais Jay ne s'est sentit le bienvenue chez lui. Jamais ses parents n'ont été fiers de lui, jamais ils ne l'ont encouragé. Ils ne faisaient que s'engueuler, se jetant le blâme l'un sur l'autre pour ensuite tenir Jay responsable de tous leurs malheurs.

« M. Morisson, expliquez-moi... Depuis quand ça dure? »

Jay réfléchit. Il n'avait pas de souvenirs où il a vécu sa vie sans haine.

« Je ne sais plus...»

« Parlez-moi alors du premier souvenir que vous avez alors que vous étiez en colère. »

« Eum... Je crois que c'était quand j'étais assez vieux pour comprendre ce que c'était la violence. Je n'avais pas terminé mon primaire, cela, je m'en souviens...»

« C'est là que votre colère envahissante a commencé? »

« Oui, je crois...»

« Qu'est-ce qui vous fait dire cela? »

« Et bien, lorsque je pense à moi enfant, je deviens fâché. Je me souviens de plusieurs bagarres, de l'intimidation que je faisais aussi... Et cela a empiré au secondaire. J'avais déjà beaucoup de colère et rajouter le fait que je ne comprenais rien à l'école et que tout le monde me disait que j'étais un imbécile. Rajoutez en plus les filles, la drogue et l'alcool, cela n'a vraiment pas aidé...»

« Non, j'imagine... C'est d'ailleurs pourquoi vous êtes ici, afin de trouver de l'aide pour gérer votre colère. »

Jay ne rajouta rien, car c'était exactement pour ça qu'il était là.

« On se revoit la semaine prochaine, M. Morrison. D'ici ce temps-là, préparez-vous, car nous allons aller dans de vieux souvenirs enfouis. Reposez-vous. »

« Merci.»

Jay attendit que son agent lui fit signe de se lever avant de le suivre vers la sortie.

Jay a fait beaucoup de délits. Ne pouvant supporter l'échec à l'école, il avait décidé de tout lâcher. Il volait, faisait du vandalisme, il a même allumé un feu. Il se battait régulièrement, il vendait de la drogue jusqu'à ce que les autorités en eussent assez de lui. Il subit un procès dans lequel il fut reconnu coupable de plusieurs chefs d'accusations, ce qui lui valut trois ans de pénitencier. Heureusement pour lui, le juge lui avait dit que s'il savait bien se comporter, qu'il respectait les règlements, Jay aurait la possibilité de terminer sa dernière année dans la communauté, en faisant des travaux communautaires. Alors, il a suivi des thérapies de gestion de la colère, il voyait un psychologue, il écoutait sagement les gardiens en prison, etc. Lorsque sa dernière année fut entamée, le juge cru en la sincérité de Jay et lui accorda la chance de terminer sa dernière année dans la communauté avec restriction. Il n'avait pas le droit de consommer de l'alcool ni de la drogue, il ne pouvait posséder aucune arme, il devait être chez lui de 22h00 PM jusqu'à 6h00 AM et ne pouvait reprendre contact avec ces anciens dealers de drogues.Il passe donc la majorité de sa journée à faire du bénévolat. Il aide les familles démunies en cuisinant et servant des repas, il lave les vêtements sales. Il a même joint l'utile à l'agréable en chantant des chansons aux enfants avec sa guitare. Puis, afin de gagner un peu d'argent pour payer son loyer et sa nourriture, de 16h00 jusqu'à 21h00, il travaille dans un musée comme préposé à l'entretien. Il lui arrive de décrocher de petits contrats en dessin (l'une de ses passions), en faisant des affiches pour des concours, par exemple.

Il gère beaucoup mieux sa colère, car maintenant, il comprend pourquoi il est ainsi. Il travaille encore beaucoup sur lui et son passé qui l'envahit beaucoup trop.