Supercalifragilisticexpialidocius

"Lolita, lumière de ma vie, feu de mes reins. Mon péché, mon âme." Je lui souris. Il me répond par un sourire pervers. Je penche ma tête vers l'oreiller. Dieu qu'il sait me parler. "Dans tes bras, je serais Lolita" ai-je envie de répondre. Cette phrase, je l'avais lu des centaines et des centaines de fois et je crois que ma passion pour cette fille est née lorsque moi aussi j'étais une de ses nymphettes comme aime l'appeler le narrateur de Nabokov. Vous savez cette période dans la vie de certaines filles qui démarre vers neuf à dix ans et qui se termine à l'âge de quatorze ans tout au plus. Je ferme les yeux...

J'avais neuf ans. Neuf petites années tout au plus, toute la famille était rassemblée, pour le spectacle de ma chère soeur Cassie... Je me souviens que je ne voulais pas y aller. Pourquoi? Certainement par pure jalousie envers elle. Je ne l'aimais pas. Et je n'aimais pas la relation qu'elle entretenait avec mes parents. Enfin bref, tout le monde l'attendait à la fin du spectacle. Sauf, qu'elle ne revint jamais... Et ce fut le début du cauchemars pour nous. Sa famille. Ma mère et mon père tellement inquiets pour moi, m'avait envoyé rejoindre une de mes grandes tante à Moscou. Loin de Londres qui était devenu pour eux trop dangereux pour leur petite princesse comme moi...

Mon arrivée à Moscou fut pour moi une sorte de renouveau. Ma grande tante n'ayant pas pu avoir d'enfant vu en moi, l'espoir de toute sa vie. M'offrant une vie encore plus luxueuse que celle dont j'avais l'habitude à Londres. Durant les quelques années loin de ma famille, je me suis forgée une sorte de nouveau caractère... Non, une carapace. Une carapace d'égocentrisme, de superficialité et une certaine forme d'arrogance poussée à son paroxysme. Ainsi donc, je pouvais me cacher. Cacher qui j'étais vraiment. Cacher cette différence. Car oui, malgré tout cela, je ne me sentais pas comme toutes les autres petites fille de mon âge. Les tests me le prouvaient: J'étais bel et bien une enfant surdouée. Pour certains, le terme surdoué évoque un avantage. Moi, je le vois plutôt comme une tare, une honte que l'on cache, car pour survivre dans ce monde, lorsque nous sommes une femme, il faut mieux être stupide...

Trois ans plus tard, me voilà de retour à Londres. J'avais bel et bien changé... Et pas qu'en bien. Mes parents ne reconnaissaient à peine. Mes géniteurs s'en voulaient et pour se faire pardonner, se mirent à exécuter le moindre de mes caprices... Chose qui avait tendances à foutre Cassie en rogne. Je me souviendrais de ce jour où, notre relation a prit un tournant dont je n'aurais jamais douté:

J'avais 16 ans. Mes amies autour de moi. Non, ce n'était pas des amies, mais plutôt des suivantes. De gentilles suivantes qui obéissaient à mes moindres faits et gestes... Ce mail, me disant qu'elle partait car c'était mieux pour nous deux... Je me souviens n'avoir rien dis du reste de la journée et lorsque je suis rentrée chez moi, un torrent de larmes se sont écoulées de mes deux yeux...

C'est alors que ce qui fut pour moi qu'un stupide passe-temps est devenu ma libération... Je me souviendrais toujours de ce jour où je l'ai compris.

Il pleuvait et je ne sais pas comment je m'étais retrouvé dans cette salle de danse déserte. Je me souviens que je n'avais pas enfilé mes pointes depuis des mois. La musique s'était mise en route et mon corps s'est sentit plus léger, plus libre de tout ce poids qui m'étouffait. Plus les jours passaient, plus la danse prenait une place des plus importante dans ma vie... Jusqu'à devenir ce qu'elle est maintenant à mes yeux.

Je crois bien que c'est lors de ce fameux gala que j'ai compris que je n'étais plus celle que j'étais avant. J'avais ma place ici. Au sommet de la société anglaise. Et je ferais tout pour y arriver

Voilà pourquoi, je suis dans ce lit. Avec cet inconnu. Inconnu qui croit encore que je me prénomme Lolita. Mais peut m'importe, ce soir, je serais sa LO-LII-TAA.