(✰) message posté Ven 23 Jan 2015 - 23:41 par Invité
“We sit silently and watch the world around us. This has taken a lifetime to learn. It seems only the old are able to sit next to one another and not say anything and still feel content. The young, brash and impatient, must always break the silence. It is a waste, for silence is pure. Silence is holy. It draws people together because only those who are comfortable with each other can sit without speaking. This is the great paradox.” ✻ Je m’embrasais dans les feux de ma passion déchue. Je connaissais John depuis quelques temps déjà ; la première fois que je l’avais croisé dans l’immense salle de discussion, son regard à la fois brisé et dur avait capté toute mon attention. Il n’était pas le seul en fauteuil roulant et pourtant il se distinguait par sa prestance et cette part d’ombre qui semblait littéralement le bouffer. J’esquissai l’ébauche d’un sourire en soupirant. Le vent cheminait autour de ma tête, décoiffant mes cheveux bouclés ou perturbant la quiétude de mes pensées. Je ne voulais pas tomber dans le cliché et paraitre aussi dérisoire à ses yeux que les autres patients du service, mais mes maux étaient malheureusement trop communs pour que je puisse me démarquer. Au fond, mes blessures au cœur m’avaient poussé au bord du gouffre et je sombrais de la manière la plus pathétique et plus lamentable qui soit. Ma colère s’éleva tout d’un coup, bravant toutes les limites de bienséances afin de s’incruster dans ma poitrine. Je peinais à respirer convenablement ou à le regarder dans les yeux sans ressentir cette folle envie de l’annihiler par la simple force de mon poing. C’était malsain, il ne m’avait rien fait, pourtant mon esprit ne semblait trouver de répit qu’à travers la violence. « C'est con. De perdre la foi en la vie comme ça. De ne plus croire en l'amour et d'abandonner. Si facilement. » Lança-t-il avec une désinvolture qui me parut presque cruelle. Je ne pouvais plus aimer Eugenia avec la même ardeur et la même passion après une année de silence et de rejet. Je ne pouvais pas réapparaitre comme par enchantement et pardonner son absence crevante. Elle m’avait détruit. Elle m’avait privé de tellement de choses, mais surtout, elle avait réussi à ébranler ma confiance. Je me sentais inutile à ses côtés. Je n’avais jamais été là pour elle lorsqu’elle en avait le plus besoin, alors je n’arrivais pas à la regarder sans ressentir une pointe de déception – non pas contre elle, mais contre moi. « Elle est handicapée, toi tu ne l'es pas. Soit valide pour deux. » Ses mots sonnaient faux à mes oreilles. Je secouais frénétiquement la tête, refusant d’accepter cette vérité. Elle n’était pas handicapée. Je n’étais pas valide pour deux. Je déglutis avec difficulté avant de me redresser contre le muret. Mon genou gauche flancha douloureusement, comme pour ponctuer mes pensées.
Je me cramponnai au briquet et aux feuilles de tabac comme un idiot, espérant que l’insouciance du cannabis pourrait me sauver de mes démons. En vain. Je fis la moue pendant quelques instants, avant d’aspirer toute la fumée dont j’étais capable. A nouveau la voix de John s’éleva contre les sifflements de vents afin de bercer mes illusions. « Ma femme a fait une fausse couche et je suis stérile. Bah je crois bien qu'on va adopter. » Annonça-t-il, et je le regardai avec une pointe de surprise et de compassion. Je comprenais les motivations de sa mauvaise humeur, mais je ne saisissais pas en quoi cet obstacle pouvait signifier la fin d’une vie de couple. Peut-être que sa condition physique rendait la moindre déception, plus douloureuse. Il vivait déjà avec le manque et la lassitude. Je fermai les yeux d’un air religieux. « Tu es stérile depuis l’accident ? » M’enquis-je avec lenteur. « Je pense que tu devrais arrêter de te poser trop de questions. » Soufflai-je. « Ce n’est jamais facile de l’autre côté, non plus. » Confessai-je. « Je ne connais pas ta femme, mais je partage son amertume et son désespoir. Je sais que ce n’est jamais facile d’accepter ou de vivre dans l’ombre d’une personne blessée. » Je ne voulais pas le contrarier, mais mes pensées avaient dépassé ma raison. Je pouvais facilement calquer sa situation sur la mienne, et je savais pertinemment que je n’avais pas la force de m’abandonner pour Ginny. Je savais que je ne serais qu’un fardeau en plus sur ses épaules frêles et désabusées.
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(✰) message posté Ven 30 Jan 2015 - 14:39 par Invité
“We sit silently and watch the world around us. This has taken a lifetime to learn. It seems only the old are able to sit next to one another and not say anything and still feel content. The young, brash and impatient, must always break the silence. It is a waste, for silence is pure. Silence is holy. It draws people together because only those who are comfortable with each other can sit without speaking. This is the great paradox.” △ Le vent s'été levé alors que les deux jeunes hommes échangées des pensées jusque-là enfouies profond dans leurs êtres. Du moins dans celui de John. Il n'avait jamais dit exactement ce qu'il avait sur le cœur et ce qu'il ressentait à un instant précis. C’est con parce que c’était pour ça au final qu’il avait « décidé » de participer à ces groupes de discussion. Savoir pourquoi il était triste ou en colère, et savoir comment gérer toutes ces sensations qu’il avait du mal à contrôler et à analyser. Il savait parfaitement pourquoi quelque chose clochait. Après tout, il était invalide depuis plusieurs mois, et après que sa femme ai fait une fausse couche, il s’été rendu compte qu’ils étaient tous les deux stériles. Plutôt dures comme informations à gérer en moins d’un an. Mais il ne savait pas pourquoi il ne parvenait pas à surmonter tout ça. Pourquoi son esprit ne se détachait pas de son corps qui lui était incapable de guérir rapidement. Pourquoi ne parvenait-il pas à guérir ses pensées, mais surtout pourquoi étaient-elles si violentes ? Tout ceci, le malheureux garçon qui devait certainement avoir un diplôme en psychologie ou quelque chose comme ça n’avait pas réussi à lui expliquer. Il avait donc été contraint de se trouver lui-même des réponses, seul avec ses pensées. Génial.
Et voilà qu’un autre participant aux discussions avec qui il avait toujours partagé des moments de silence empreints de paix était la personne à qui il se confiait et tentait d’expliquer une situation qu’il ne s’expliquait pas à lui-même à la base. Et visiblement, le chemin de pensées de son camarade n’était pas si simple non plus. Alors qu’il tentait de lui expliquait la situation avec son ancienne meilleure amie, tout lui paraissait clair. Pour John, il n’y avait rien de plus simple : Jules devait au moins tenter de pardonner à Eugenia, et l’aider à présent qu’ils étaient à nouveau réunis. Même si c’était difficile pour lui, et qu’elle l’avait fait souffrir, il devait au moins essayer. Mais apparemment ça n’était pas si simple dans la tête du blond. Et John n’insista pas. Il n’était pas à sa place. Il ne connaissait pas ses sentiments, les sentiments de la jeune femme, et les circonstances de cette situation. Il n’avait pas d’avis à donner, et les seuls mots qu’il avait pu donner n’étaient pas les bons. Il préféra laisser la place à des personnes plus proches du couple et surtout, plus avisées de donner des conseils.
Par contre, il s’été confié. Il ne savait pas trop pourquoi en fait. Si lui ne parvenait pas à comprendre la situation de Julian en profondeur, comment ce dernier arriverait-il à se mettre à sa place à lui ? « Je ne sais pas. Quelques mois après l’accident, elle a réussi à tomber enceinte. Mais le bébé est mort. » Mais dans son fort intérieur, John était persuadé que c’était à cause de l’accident. Ça ne pouvait être que ça. Même s’il n’avait jamais vraiment tenté d’avoir d’enfant avant et qu’il ne pouvait pas vraiment comparer, il en était persuadé. « Je me mets souvent à sa place. Je sais que ça ne doit pas être facile tous les jours, et je sais que je suis un boulet pour elle. Malgré ça, elle est toujours à côté de moi. A essuyer mes larmes et à me redonner le sourire dans les pires moments. J’ai l’impression qu’elle fait plus d’efforts que moi pour qu’on aille mieux tous les deux. J’ai l’impression de la ralentir, et je ne sais pas comment faire pour avancer, je n’y arrive pas. Elle vit pour nous deux, et je lui mets des bâtons dans les roues, je ne pense même pas la mériter. » Voilà tout ce qu’il pensait de sa situation actuelle avec sa femme. Une véritable catastrophe.
Ses mains étaient maintenant presque violettes. Il les frottait l’une contre l’autre, tentant de se réchauffer. Le temps passait vite, et en même temps, John avait l’impression que tout était suspendu depuis qu’il s’été présenté à Julian.