Circé } I'm on your magical mystery ride

Le son des sirènes au loin, rien d’inhabituel, je fermais légèrement les yeux en me demandant quelle horreur s’était produite encore. Je réfléchissais me demandant pourquoi des malheurs arrivaient à certains, je n’avais que sept ans et pourtant je me posais des questions sans réponse possible. Mon père me disait souvent que je réfléchissais trop, qu’il fallait que j’apprenne à mettre mon cerveau sur pause car je n’aurais jamais les réponses à toutes mes questions. J’essayais de me vider la tête mais je ne comprenais pas, nous étions heureux et notre vie ressemblait à la vie parfaite, je voulais que tout le monde connaisse ce bonheur, cette chose qu’on appelle famille. Oui nous étions un peu le prototype de la famille parfaite, le père aimant qui accorde tout à ses filles, une mère un peu plus stricte mais qui donnerait sa vie pour sa famille et qui faisait tout en son pouvoir pour que chacun puisse faire ce qu’il souhaite. Et les deux petites jumelles, Calypso et moi, Circée. Oui nos parents aimaient Ulysse visiblement, je ne sais pas vraiment pourquoi ils nous ont donné ses prénoms, voyant surement en Calypso ma sœur une nymphe toute gentille et en moi une sorcière qui change les hommes en porc. J’ai souvent souris face à ce choix qui nous scie chacune assez bien.
Le cri de ma mère me tira de mes pensées, je courrais pour la rejoindre, ce cri avait retenti dans toute la maison, on avait pu y entendre un mélange de désespoir et de profonde tristesse. Je regardais en direction de la porte, des hommes en uniforme, ses sirènes c’était pour nous. Je restais en retrait alors que ma sœur était déjà aux côtés de notre mère en train de pleurer. Je ne versais pas une larme, non il fallait que je sois forte pour elles, il fallait bien que quelqu’un garde la tête froide et du haut de mes sept ans je me donnais une mission impossible à tenir pour une enfant. Les policiers semblaient toucher par cette scène, ils avaient l’air réellement désolé pour nous ce qui m’étonna car ils ne nous connaissaient pas, ils ne pouvaient pas estimer l’impact que leur annonce avait eu sur notre vie et notre famille, nous non plus d’ailleurs à ce moment précis. Mon père avait joué les héros, rien d’étonnant venant de lui, il était mort en essayant de défendre les autres, ça aurait dû nous rendre fières et pourtant j’étais folle de rage contre lui. Il nous avait abandonné, certes de façon involontaire mais au final c’était le même résultat. Je crois que le jour où mon père est mort et bien ma mère aussi, elle a perdu toutes raisons de se battre, de vivre, comme si son monde tournait autour de lui, oui il était le soleil et elle était la terre. Je m’occupais donc de ma mère et ma sœur ce soir-là, les mettant au lit pour qu’elles se reposent, elles étaient exténuées à pleurer toutes les larmes de leurs corps. J’étais restée près d’elles pour les observer dormir, elles semblaient si paisibles, si loin de la scène dont j’avais été spectatrice plus tôt. Au bout d’un moment je m’étais dirigée vers le bureau de mon père, tout était si paisible, je m’étais allongée sur le canapé qui se trouvait d’un côté et j’avais commencé à pleurer. J’avais pleuré jusqu’à ce que je m’endorme, me réveillant parfois complètement perdue jusqu’à ce que les souvenirs de la soirée me reviennent, alors je sanglotais et je finissais toujours par me rendormir.
L’enterrement fut horrible, tous ses gens qui venaient vers nous, mais moi je ne voulais pas de leur pitié, je voulais récupérer mon père, je voulais retrouver ma vie d’avant, oui cette vie loin de la tristesse et de la peine dévorante. Je ne sais pas si je réalisais vraiment la perte ou si c’est la peine de notre mère qui nous faisait être aussi mal. Elle semblait si malheureuse alors nous l’étions aussi. Elle était assise en train de pleurer encore, je n’en pouvais plus de cette image, je n’en pouvais plus de l’entendre pleurer. J’avais besoin de mettre de la distance entre le son de ses pleurs et moi, je prenais alors mes jambes à mon cou, m’éloignant le plus possible enfin pas non plus trop loin, de toute façon personne n’allait remarquer mon absence. Je tentais de fuir cette ombre qui semblait s’abattre sur nous. Je n’allais pas très loin, une sorte d’aire de jeu, je restais assise à contempler les alentours, rapidement ma sœur jumelle me retrouva. Son visage m’apaisa tout de suite, elle était mon repère dans le noir, celle pour qui j’avais envie de retourner dans la lumière à chaque fois que j’avais un coup de déprime, ça a toujours été comme ça. Quand je ne me sentais pas assez forte pour me battre, un simple regard vers elle et je retrouvais mon courage pour me battre. En réalité je ne me suis jamais battue pour moi mais pour elle, pour qu’elle ait la vie dont elle rêvait parce que même aussi jeune j’avais ce sentiment que j’appartenais aux ténèbres. Je ne sais pas si c’est le prénom d’une sorcière à demie-déesse ou quoi mais je savais pertinemment que ma vie serait pavé d’épreuve pas forcément toute rose.
Le deuil, chacun le vit à sa façon et je respecte ça enfin sauf celui de ma mère, peu à peu elle sombra dans la folie, voyant la religion comme son exutoire, comme l’endroit ou elle pouvait trouver la paix. Ma sœur et moi ne disions rien, tentant de vivre nos vies de nouveau normalement, on avait perdu notre père et pourtant on nous demandait toujours les mêmes choses. La vie devait continuer et je pense que notre mère a pris un chemin diffèrent du notre mais en tant qu’enfant on se devait de la suivre quelque que soit ses décisions. Les réponses à ses questions se trouvaient dans ses prières soit disant mais surtout chez son nouvel ami Jedahiah, un homme un peu étrange mais il paraissait inoffensif, il était peut-être un peu trop ancré dans la religion à mon goût mais rien de bien méchant aux premiers abords. Il tentait d’aider ma mère comme il pouvait, enfin c’était mon impression il semblait vouloir la sortir de ce deuil. Sauf qu’il avait surtout mis la main sur une personne instable et influençable car un matin sortant de nulle part ma mère est entrée dans la chambre qu’on partageait avec Calypso, elle commença à faire nos valises alors qu’il n’était pas prévu qu’on parte. Ma sœur me lançait un regard étonné mais surtout apeuré quand ma mère nous dévoila ses plans. Je tentais de rassurer Calypso mais moi-même je ne sentais pas vraiment ce déménagement comme une bonne chose. J’essayais de l’arrêter, cette communauté dont elle parlait ça ne nous intéressait pas, c’était trop étrange. Mais on était obligée de suivre notre mère quoi qu’on pense ou qu’on veuille, nous n’avions que huit ans et du coup pas vraiment d’opinion à émettre enfin si mais personne n’y ferait attention.




Au départ ce n’était pas si mal que ça la vie en communauté, il y avait pleins d’enfant et c’était amusant comme si nous étions en vacance, en fait je crois que je voyais ça comme un voyage qui aurait bientôt une fin, sauf que ma mère n’avait pas décidé d’ouvrir les yeux. Alors on évolua dans ce milieu, dans cette soit disant endroit de paix qui cacher simplement une secte et un bourrage de crâne permanent. Jedahiah était le gourou, le leader, la tête pensante et le seul qui saurait nous guider vers la voie à suivre. Chacun participer et alors que Calypso se trouvait une passion pour les animaux moi au contraire j’étais plutôt manuelle, plutôt garçon manquer qui va bricoler même si j’aimais beaucoup cuisiner à côté de ça. Je n’avais pas réellement de don ou de passion, je faisais un peu de tout, des activités diverses c’est ce qui me permettait de tenir et de ne pas avoir trop de temps pour réfléchir à cette vie. On grandissait, on essayait de garder cette façade et je me découvrais un don pour les mensonges et pour cacher ce que je ressentais réellement. Je n’étais qu’une simple façade que je servais à tous le monde, la seule qui réussissait à lire en moi comme dans un livre ouvert était ma sœur mais elle ne me trahissait jamais, nous étions soudées dans cette épreuve dont on espérait voir la fin un jour. Je rêvais déjà au jour ou on allait s’enfuir, oui je montais des plans dans ma tête mais il fallait attendre qu’on soit plus vieille. Deux jeunes filles de quatorze ans ça se remarque, j’aurais été seule ce n’était pas un problème, j’étais plutôt débrouillarde et j’aurais pu m’en sortir mais ma sœur, elle me semblait encore si fragile et innocente je ne voulais pas lui enlever ça. C’était compliqué pour moi de trouver ma place, je ne me sentais pas bien dans cette ambiance et chaque jour était une épreuve en plus pour moi, je n’ai jamais été très croyante et ça ne s’arrangeait pas en grandissant, ce bourrage de crâne qu’on nous infligeait m’énerver au plus haut point je m’étais d’ailleurs faites remarquer plusieurs fois en essayant de débattre avec nos ‘enseignants’, on apprenait rien à mes yeux et je me sentais enfermer dans cette ambiance. Je partais alors en vadrouille dans les limites du ‘secteur’ et j’explorais. Mais au bout d’un moment j’avais tout vu et je rêvais de dépasser ses limites qu’on nous mettait. De temps en temps on pouvait sortir de la communauté pour aller faire le marché ou des petites choses comme ça en vue de recruter de nouvelles personnes, c’était une bouffée d’air frais pour moi-même si je me sentais à part de ce monde ne serait-ce qu’au niveau des vêtements, j’avais l’impression d’avoir dix ans de retard sur les autres adolescentes.

Vers nos quatorze ans tout changea, Jedahiah commençait à nous montrer un certains intérêt avec Calypso, au départ rien de bien méchant ou effrayant même si je n’aimais pas trop ça, on avait réussi durant des années à passer à peu près inaperçu mais il se montrait très pressant, il passait beaucoup de temps chez nous enfin ce qu’on devait appeler un chez nous. Je ne disais rien, ma mère était folle de joie et visiblement ils faisaient tout un tas de plan sans même nous inclure. Un soir j’avais des insomnies j’étais donc allée à la cuisine pour boire un verre et j’avais surpris une conversation entre ma mère et Jedahiah. Très rapidement j’avais compris leurs plans, on allait devoir se ‘marier’ avec lui, cet homme bien trop vieux et surtout trop étrange et notre mère nous donnait comme du bétail et avec joie. Elle ne se rendait pas compte que ce n’était pas normal, on était trop jeune, c’était insensé, on ne pouvait pas se marier aussi jeune. Je sortais de la maison le plus discrètement possible, me rendant jusqu’aux limites imposés, j’aurais pu partir ce soir-là, j’en avais envie et je me suis détestée de ne pas avoir fuit parfois mais je ne pouvais pas abandonner ma sœur, c’était hors de question. J’étais simplement rentrée, remettant cette façade et j’avais fait comme si de rien était. Très vite tout fut organiser, Calypso et moi on a monté des plans mais je les savais impossible, on ne pourrait pas s’en sortir seules. Je me dirigeais vers ma destinée, oui car on nous bassinait comme quoi le messager de Dieu nous avait choisi pour être les femmes du meilleur homme. C’était simplement un pédophile qui profitait des gens, rien de très glorieux à mes yeux mais bon.
Le mariage eu lieu, ce n’était rien face au après mariage, je me disais que le pire était passé et pourtant j’étais loin de m’imaginer ce qui m’attendait. La nuit du mariage je me retrouvais dans une chambre séparée de celle de ma sœur, chacune de notre côté. C’était la première fois que je dormais loin d’elle, nous n’étions pas enfermées et pourtant c’était tout comme, des hommes se tenaient devant la porte. Je tournais en rond, me demandant ce qui allait se passer maintenant, après tout il allait faire comment pour nous partager. Je n’entendais aucun bruit, le silence était horrible, trop pesant, tout était trop calme. Je m’installais sur le lit, cherchant le sommeil, j’essayais de réfléchir à cette journée mais même mes pensées semblaient m’échapper, en même temps que ma vie. Puis j’entendis la porte s’ouvrir, je savais que c’était lui pas besoin d’être devin en même temps. Il s’allongea à côté de moi comme si c’était la chose la plus normale au monde. Je me tournais vers lui, le regard plein d’interrogation mais le sien était simplement rivé au plafond, comme si il était en réflexion. Il m’agrippa simplement pour me coller contre lui, un geste affectueux étrange mais je me laissais faire comme une marionnette. Je ne sais pas combien de temps ça dura, une éternité à mes yeux et j’espérais qu’il s’endorme. Je savais qu’une jeune mariée devait coucher avec son mari mais je n’étais pas prête, non je ne pouvais pas. Lorsqu’il posa sa main sur ma cuisse mon mouvement de recul l’étonna, il commença à être un peu plus pressant mais je le repoussais. Je ne sais pas si c’est mon regard déterminé ou mon geste mais il ne tenta rien cette  nuit-là. J’ai réussi à le repousser durant des mois, mais la seule raison de ce courage tenait a un prénom Xander. C’était un des derniers arrivants, on passait beaucoup de temps ensemble sans vraiment être ensemble. On ne se retrouvait pas souvent seul à deux, les seules fois ou ça arrivait quelqu’un débarquait et pourtant je me sentais comme attirée par lui. Je mettais ça sur le compte des hormones mais il y avait quelque chose chez lui, dans son regard. Il n’était pas comme les autres adeptes mais du jour au lendemain il disparut et le jour de sa disparition l’une des pires choses se produites. J’étais dans la chambre et j’étais triste, je n’avais pas vu Xander de la journée, je m’étais habituée à sa présence, il m’apaisait et me rassurait quelque part. Jedahiah entra, il y avait de la haine et de la rage dans son regard, je ne l’avais jamais vu comme ça, je me demandais ce que j’avais bien pu faire. Sans un mot il se dirigea vers moi et m’attrapa par la gorge pour me plaquer contre le mur. J’avais du mal à respirer, un mélange de peur et de haine, je me débattais mais je ne faisais pas le poids contre lui, il me balança dans le lit en un geste et il se plaça sur moi. Il agrippa mes poignets avec ses mains et j’étais à sa merci, il commença à déposer des baisers le long de mon cou. J’avais envie de crier mais aucun son ne sortait de ma bouche, j’étais paralysée, je savais que si je faisais du bruit se serait pire. Il murmura des paroles insensées à mon oreille, comme quoi je l’avais fait languir mais qu’aujourd’hui s’en était fini pour moi et que j’allais enfin connaître la vie. Tout était d’une lenteur atroce, il n’émettait aucune douceur, il m’arracha mes vêtements et sans plus attendre me pris ma virginité. Pas de larme, aucuns bruits, rien. Je n’étais qu’un corps, il m’avait tout pris de toute façon et c’était comme si la boucle était bouclé avec cet acte. Il s’arrêta au bout d’un moment, en me disant que j’étais enfin une femme, que j’étais sienne pour toujours et qu’il venait de me changer. La chose la plus étonnante fut qu’il me prit dans ses bras, comme la première nuit qu’on avait passé ensemble. Il caressait mon épaule en souriant, je ne faisais rien, j’avais arrêté de vivre en quelque sorte depuis qu’il était entré dans la chambre, j’étais devenue inerte.

Je n’ai plus jamais eu de nouvelle de Xander, c’est comme si il n’avait été qu’un mirage et pourtant dans ma tête c’était de sa faute si Jedahiah m’avait tout pris le jour où il avait disparu. J’avais besoin d’un coupable et il était le seul que mon cerveau arrivait à trouver. Mes rapports avec Jedahiah ont changé après ce jour, il redoublait d’effort pour être tendre, mais c’était toujours la même chose, j’étais simplement un pantin, je le laissais faire ce qu’il souhaitait sans rien dire. Je n’étais plus maître de mon corps, mon esprit, non je lui appartenais et je faisais comme si c’était réellement le cas. Mon cerveau lui réfléchissait à des façons de se sortir de tout ça mais mon cœur était meurtri. Pourtant je le laissais me prendre dans ses bras, j’étais docile comme un animal mais un feu commençait à prendre en moi. Je me disais qu’il fallait que je fuis, ce que je subissais ma sœur le vivait aussi même si j’essayais de faire en sorte que Jedahiah passe la plupart de ses nuits avec moi. Je lui disais souvent que je ne pouvais pas dormir s’il n’était pas à mes côtés et que je voulais être avec lui, j’essayais d’épargner ma sœur du mieux que je pouvais et j’avais l’impression de ne pas être très doué.



La vie suivait son cours, rien de bien intéressant, j’essayais de réfléchir à une sortie de secours dans cette vie que ma sœur subissait, parfois j’avais même envie de proposer à Jedahiah de ne garder que moi et de la laisser libre. Mais je savais qu’elle m’en voudrait et je n’étais pas sure de réussir à vivre avec ça sur la conscience puis Calypso ne voudrait jamais partir en me laissant, ce serait une torture. Nous étions à la messe, rien de très étonnant on passait notre temps dans cette pseudo église, on devait écouter les conneries de Jedahiah mais l’ambiance était différente, déjà la veille il avait été étrange, comme distrait, mais il s’était détendu alors je ne m’étais pas posée plus de question. Il avait même été enjouer et pour la première fois j’avais vu une autre de ses facettes, on avait parlé de son enfance, de la vie, de ses voyages, il s’était livré et moi aussi un peu, je lui avais parlé de mon père, de ce besoin de rester forte pour ma mère et ma sœur. Il m’avait confié qu’il me trouvait courageuse, c’est ce qui lui plaisait chez moi, j’avais cette force intérieure d’après lui et je pourrais me sortir de toutes les situations. Je l’avais trouvé étrange, c’était comme si pour une fois je pouvais voir de la sincérité en lui. Mais nous étions le lendemain et il était en train de parler, son discours était étrange tout comme lui, très vite on se retrouvait enfermer dans l’église, je sentais le regard effrayé de Calypso cherchait le mien mais moi j’essayais simplement de trouver une issus. Très vite les flammes commençaient à monter et je prenais la main de ma sœur, je la forçais à se baisser le plus près du sol pour éviter la fumée. Les gardes ne voulaient pas lâcher l’affaire, les cris des gens étaient horrible, l’odeur aussi, j’avais la nausée. Grâce à une famille on réussit à sortir, le père n’avait pas laissé les gardes lui barrer la route et on se retrouvait rapidement dehors, je trainais ma sœur, lui serrant la main fort de peur de la perdre. Je ne la lâchais pas, non je voulais la garder près de moi. Je fixais le bâtiment en feu, des personnes étaient sorties mais la plupart était à l’intérieur par choix ou pas. La police et les pompiers débarquèrent rapidement, nous interrogeant, nous prenant pour des fous. Pourtant la communauté était connue par le bureau de police, on fut prise en charge par le système à compter de ce jour. On nous força a un suivi psychologique, ça ne me plaisait pas, j’y allais mais je ne disais rien, je n’avais pas envie de parler, ça ne servait à rien. C’était trop tard et revenir sur le sujet n’allait pas effacer ce qu’on avait vécu.

Le plus difficile pour moi c’était de revenir à une vie normale, nous étions différentes et les autres au lycée nous voyait comme des parias, la vie était difficile et très rapidement je me trouvais un petit boulot de caissière pour faire en sorte que ma sœur puisse avoir ce qu’elle voulait et surtout qu’elle puisse envisager de poursuivre ses études. Moi j’allais au lycée le matin et au travail le soir sans but précis, sans envie particulière. Ma sœur avait un avenir, moi pas, c’était dans ma tête depuis longtemps et je faisais simplement ma vie en fonction d’elle, comme si elle avait plus d’importance que moi. Heureusement l’adolescence pris fin rapidement, bien que la nôtre s’était arrêtée le jour de notre mariage forcé enfin faux mariage, je ne sais pas vraiment comme appeler ça. Le rêve de Calypso était d’aller en Angleterre, elle pensait qu’en changeant de pays on pourrait se reconstruire, refaire notre vie, je n’y croyais pas mais je la suivais car imaginer ma vie sans elle était impossible, je ne pouvais pas être loin d’elle. Alors qu’elle se construisait une vie et un avenir, je passais de petit à boulot à d’autres petits boulots, serveuse, femme de chambre, ouvrière en bâtiment et j’en passe. Je n’avais pas trouvé cette fameuse voie même si j’aimais l’ambiance dans les bars, la vie la nuit était tellement mieux. Je faisais beaucoup de cauchemar de l’incendie, j’en fais toujours, d’après Calypso il faut que je retourne voir un psychologue mais je n’en ai pas le courage. Je n’ai jamais parlé de ce qui nous était arrivé et je ne veux pas, peut-être par rapport à cette dernière nuit avec Jedahiah. Calypso le hait mais dans le fond je commençais à le comprendre et je culpabilise par rapport à ça, dans le fond j’aurais aimé rester dans cette église car je ne pensais pas que ma vie valait la peine d’être vécu. Mais il fallait que je sorte ma sœur de là et la guider. Aujourd’hui je travaille comme barmaid dans un bar, je vis simplement et j’essaye de trouver une raison de me lever chaque matin mais je sens que les cauchemars augmentent et que les choses sont de pires en pires. A un moment les choses allaient un peu mieux, j’avais rencontré quelqu’un et je commençais à avoir confiance en lui-même si c’était difficile pour moi, j’essayais de me dire qu’il fallait que j’envisage un avenir, autre chose. Il semblait si gentil, si simple et même si ce n’était pas l’amour fou de mon côté je me disais que je pourrais apprendre à l’aimer petit à petit. Sauf que les choses ne fonctionnent pas de cette façon et je pense qu’il le sentait, il devait comprendre que je ne l’aimerais jamais de la même façon que lui. C’est surement pour cette raison que je l’ai trouvé avec une autre fille. Mais des histoires comme ça j’en ai à la pelle, j’ai eu des histoires mais je n’ai jamais réussi à me lâcher, je n’ai jamais ressenti de papillons dans le ventre ou de connerie dans ce genre pour ces hommes, comme si j’étais incapable d’aimer quelqu’un de cette façon. Alors je me suis faite une raison, l’amour n’est peut-être pas pour moi non plus, j’ai du railler tellement de chose de ma vie, j’avais de l’espoir avant et je croyais que j’aurais une vie tranquille comme celle de mes parents mais j’ai l’impression qu’on m’a enlevé tout ça, que ça n’arrivera jamais, que je ne le mérite pas ou quelque chose du genre. Je me suis donc faite une raison, j’ai décidé d’arrêter d’y croire et de m’en sortir comme je pouvais, on peut me penser pessimiste mais je préfère me dire que je suis simplement réaliste. Les contes de fées ne sont pas pour moi, ce n’était pas écrit dans ma destinée, d’ailleurs je me demande ce qui l’était car aujourd’hui je ne vois pas vraiment en quoi ma vie a de l’intérêt.