(rhiannon) ✘ 1.21 gigawatts ?!

« Y a pas une fois dans ta vie ou tu t'es dit : merde où je vais comme ça ? Pourquoi ? Tu ne t'es jamais remis en question ? Parce que moi si tu vois, attends que je te raconte ma vie. Mais nah ça va pas être long, prends un verre quand même, pour si jamais hein. Quoi ? De la Smirnoff ? Nah, un bon vieux Jack Daniel's ira très bien. Tu vois qu'on peut sympathiser rapidement toi et moi ! » Elle croise les jambes sur la banquette du fond en buvant une gorgée de sa boisson.

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Un jour elle est née, logique sinon elle ne serait pas là aujourd'hui, elle n'était pourtant pas seule, une autre venait dans le lot, deux pour le prix d'une. A vrai dire, ils ne surent jamais qui était l'ainée. Parfois Rhiannon, parfois Genesis selon leurs envies et la situation. Leurs parents étaient des personnes très cultivées, très artistiques et laxistes, peut-être un peu trop d'ailleurs. Ils ne leur ont jamais imposé de limites, jamais interdit quoique se soit, rien, nada, le vide complet. Non pas qu'ils n'aimaient pas leurs jumelles loin de là, mais ils avaient une toute autre mentalité, à des années-lumière de la galaxie des autres personnes qualifiées comme normales. Ils avaient confiance, sûrement trop pour deux rouquines écossaises. Mais après tout, ils avaient déjà énormément de boulot avec Sara comme pour surveiller tout ce que faisaient les jumelles. Sara est leur sœur ainée, d'un an pour être exacte. Mais Sara avait un gros problème depuis toujours. Un certain trouble de la personnalité qui l'obligeait à rester enfermée dans leur maison. Surveillée par les parents et son psychiatre, Rhiannon et Genesis apprirent au fil des années à gérer leur ainée plus au moins bien. Connaissant chaque personnalité petit à petit, riant quand grand-père faisait son entrée, fuyant que la dérangée arrivait. Elles n'eurent jamais l'occasion de passer du temps ensemble réellement, il y avait toujours quelqu'un pour veiller à ce que tout se passe bien. En réalité elles étaient un peu comme des étrangères. « Anthropologue judiciaire, c'est bien ça, on découvre des choses. » Avait-elle dit en cette soirée d'automne au bord de l'eau froide. « Charmant, je savais pas que tu aimais les ossements toi qui pleure avec un seul épisode de Billy et Mandy. » Rétorqua son reflet, un sourire en coin. « Nah nah nah Jane Bennett, c'est bon. » Elle se releva pour s'engouffrer dans les ruelles de la ville. Ces mêmes ruelles qu'elle connaît depuis seize ans maintenant, celles qui ne changent jamais. « Oh allez, mature un peu Lydia ! » La deuxième crinière rousse s’engouffre à son tour dans le dédale de Stromness. « Ça se dit mûris ! » Oui, mûrir, ou comment comparer un humain à un fruit.
C'est ainsi que le temps passa, les mois, les années, petit à petit. Bientôt elles partirent toutes les deux étudier à Glasgow s'éloignant plus de leur famille. Pourquoi cette ville ? Et bien parce que c'était la capitale tout simplement, n'ayant pas les moyens d'aller plus loin pour le moment. Rhiannon se spécialisa en lettres entre les fêtes diverses et variées de l'université auxquelles elle assistait avec son clone. Être jumelles a des avantages, beaucoup plus qu'on le pense. Quand une voulait le cours de l'autre, il leur suffisait d'échanger. Si l'une voulait se venger d'un mâle, l'autre l'aidait dans sa tâche. C'est ainsi que Genesis due recoller les morceaux quand monsieur James Dean s'en est pris à la vertu de sa sœur et que cette dernière a fait comprendre à Steve Jobs qu'on ne laissait pas tomber l'autre Lockhart. Vous êtes embrouillés c'est ça ? Imaginez ceux qui les côtoient chaque jour alors. Tous les quiproquos qu'il y a eu, on pourrait les rassembler et écrire un livre avec. Magnifique histoire de leur vie normale malgré tout.


« Et on va se marier ! » C'est avec cette étincelle du cœur amoureux dans les yeux qu'elle annonçait la bonne nouvelle à sa sœur. Heureuse, insouciante, amoureuse surtout. Aveuglée par toute cette joie. « Oh oh oh,, qui parle de mariage oh, rien de ça ici, pas temps que les études ne sont pas terminées ! » Il fallait toujours que l'une soit le mot pour clouer la bouche de l'autre. « Je peux savoir pourquoi tu es si.. » « Intelligente ? » « Casse-pied plutôt. » « Parce que je suis ta sœur, peut-être. » Rhiannon referme le livre très intéressant sur les oiseaux du Colorado qu'elle faisait semblant de lire depuis dix minutes déjà. « Alors, arrête de l'être veux-tu ! » « Ta requête est génétiquement impossible. » Impassible, le nez fourré dans ses fiches, elle était comme ça Genesis, le monde pouvait s'écrouler qu'elle ne le remarquerait pas et agirait avec une quiétude tout ce qu'il y a de plus exécrable pour le commun des mortels. Soufflant une mèche devant ses yeux, Rhiannon s'installa lourdement sur le fauteuil en face de sa sœur en croisant les bras. Elle la fixait, ne voulant pas la lâcher, elle va bien craquer, d'un moment ou l'autre. HA HA, elle pose son stylo sur la table et ferme ses documents. « Bon très bien, pour quand ce mariage ? » OUI ! Elle le savait, elle le sait, lien psychique qui vient les unir ou quelque chose comme ça sûrement. « Trois mois, ici à Glasgow, à onze heures ! » A peine sa phrase terminée, la voilà qui s'en va hors de la pièce « Quoi, TROIS MOIS ? RHIANNON ! » Elle plaque sa main contre sa bouche, après tout elle est dans la bibliothèque. Vicieuse.


Pourtant ça n'est jamais arrivé, ce mariage n'a jamais eu lieu. Il est parti, comme ça, un jour. Enfin, elle ne l'a plus jamais revu et les suppositions sont allées bon train. Menteur, volage, kidnapping même, toutes ces petites rumeurs dans les couloirs. Idiote, imbécile, immature. Elle n'a jamais pu s'en remettre, elle étouffait même, tout lui rappelait cette trahison, cet affront ignoble. Elle choisit donc de partir s'exiler à Londres, poursuivre ses études là-bas, effacer cette dernière année de sa vie pour recommencer à enfin respirer. Genesis venait avec elle, trop inquiète pour la laisser seule dans cette grande métropole inconnue. Vingt-et-un ans au compteur, un cœur brisé et un avenir incertain après ce coup dur. Loin des murmures, loin des moqueries, sa sœur à ses côtés comme toujours, une nouvelle ville à découvrir.


« Journaliste pour The Sun, ça mérite un bon petit verre au.. Nightjar cette fois ! » Dans leur appartement à Shoreditch, la fenêtre grande ouverte laissant pénétrer le froid de la nuit, Rhiannon était appuyée contre celle-ci, fumant sa dernière cigarette. Mauvaise habitude qu'elle a prise, pourtant un paquet chez elle pouvait durer une semaine ou plus. « Quoi, maintenant ? Hun hun, il faut que je bosse demain. » Elle jette la fumée dans la ville, écrase ce qu'il reste et ferme la fenêtre. « Maintenant ou jamais, allez viens pour cette dernière nuit de débauche ! » Genesis savait se montrer très persuasive, venant de sa bouche, les mots devenaient enivrants, une douce mélodie qui invite à la danse. C'est sans trop d'hésitation que Rhiannon s'envola se changer, qu'elles profitent de cette soirée.


Elle se préparait devant le miroir, lentement. Enfilant sa robe noire de soirée, sa couleur fétiche pour ce genre de mission. Lâchant sa longue chevelure ondulée, retouchant un peu son eye-liner et son rouge à lèvres. Parfait, elle était fin prête. Passant une main dans ses cheveux pour leur donner du volume, elle se saisit de son sac et sort de sa chambre. « Je sors, je rentrerais tard. » « Amuses toi avec ta conquête. » Conquête, si seulement elle savait. Rhiannon ne croit plus en l'amour, plus aux relations ni même aux hommes. Elle se consacre à tout autre chose maintenant, plus utile que le journalisme, elle évite que d'autres jeunes filles crédules ne tombent dans le panneau. Son cas le plus récent ? Cette jeune fille avec ce petit ami trop volage. Voilà un cas qui la touchait de près, peut-être la rouquine se voyait-elle trop dans ce cas, dans cette jeune fille. Rose qu'elle s'appelait, très jeune, très insouciante. Une personne qu'il faut savoir protéger et guider. « Mmm ». Elle enfile ses chaussures, prend sa veste et sort faire son travail. Briseuse de couples professionnelle.


« Et donc, ce nouveau-là c'est du sérieux ou pas ? » Deux ans plus tard, toujours dans le même appartement, toujours les mêmes jobs et ce secret qui devient de plus en plus pesant pour Rhiannon. Elle aimerait le dire, en parler avec Genesis, mais il est beaucoup trop compliqué, trop lourd. « Nope, diner professionnel seulement, tu sais comment c'est. » Sa sœur met rapidement le plat de lasagnes au four et se rue sur Rhiannon, la planquant sur le sol. « Ouvre ce sac ! » « Geny, mais arrête ! » « Sac, maintenant ! » C'est sans attendre plus longtemps qu'elle l'attrape pour le fouiller. Carnet, crayon, dictaphone, une petite loupe même. Toute la panoplie de Rhiannon pour enquêter sur un homme. « Professionnel, Rhiannon qu'est-ce que tu me caches ?! » Elle se débat sous le poids de sa sœur, vraiment, elle a plus de force qu'elle le pensait. « Geny, s'il te plaît, écoutes moi ! » Elle lui enfonce comme elle peut le gant de cuisine dans la bouche pour lui empêcher de parler. Yeurk, il avait un goût de brûlé. « Pourquoi tu ne m'as rien dit ? Je suis ton frère quand même Fred ! » Elle lâche un peu prise et se met à pleurer, une larme tombe sur le nez gelé de Rhiannon. « Mpf pfm mpf » A.k.a je suis désolée, pardonne-moi ! en langage gant de cuisine. « Je.. Je croyais qu'on était ensemble ! » Elle avait mal, entendre sa sœur, son clone pleurer par sa faute. Elle aurait dû lui dire, il y a longtemps qu'elle aurait dû. Mais elle a toujours été lâche pour se dévoiler quand les gens chers à son cœur étaient concernés. Voilà qu'elle aussi est triste maintenant. « Il fallait me dire que tu étais détective ! » .. Il lui fallut quelques secondes pour réaliser, pour comprendre pourquoi ce petit rire qu'elle entendait. La fourbe, la fourbine ! Dans petit coup de coude dans les côtes, Rhiannon se dégagea, laissant Genesis rire à gorge déployée sur le sol. « Très drôle, très très drôle ! » Elle lui lance le gant, sèche ses larmes et s'en va en claquant la porte. Même pour rire, mais pour une blague, Rhiannon avait eu mal, beaucoup trop.


« Serais-tu en colère contre moi ? » Courant le long de la Tamise, les écouteurs sans musique enfoncés dans les oreilles pour faire semblant ne pas l'écouter, Rhiannon avait évité sa sœur depuis une semaine déjà. Elles n'étaient jamais restées en froid autant de temps, surtout quand il s'agissait d'une blague, après tout elles sont les rouquines, les nouvelles Weasley légèrement remaniées par Jane Austen. « Absolument pas, j'ai encore le goût de ton gant dans la bouche, il m'empêche de m'exprimer sans t'inonder d'odeur à lasagnes tout simplement. » Il faisait frisquet, pourtant ça ne les retenait pas de sortir en short et t-shirt dès le petit matin pour leur jogging matinal. « J'aurais dû t'enfoncer du liquide vaisselle à la fraise également si j'avais su. » Elle laissa échapper un petit rire, poussant légèrement sa rouquine d'une main. « Et sinon, le boulot ? » « Depuis une semaine ? Rien, j'ai sauvé l'univers deux fois, empêché un troisième Big Bang, trouvé comment Moriarty avait tout planifié. Tu vois, tout est normal. » « Hahaha, je suis sûre que tu as tout faux, tu ne vois rien, même si c'était sous ton nez. » « Oh vraiment ? Mademoiselle aurait quelque chose à me dire ? » « Possible. » « Accouche Rhia ! » « Ça fait plus de dix minutes que ce type te suis pour reluquer ton joli petit derrière. Tu devrais t'arrêter et l'inviter à boire un verre, le pauvre semble au bord de la crise d'asthme. » « Le tien je dirais, de là où il est, je suis sûre qu'il a un bon angle. » « D'accord, alors je vote pour les nôtres » ces sourires en coin, ces hochements de tête approbateurs qu'elles se lancent depuis des années et qui, elles l'espèrent, dureront encore jusqu'à leur denier souffle dans bien longtemps. « HEY, HEY OUI TOI ! » Elle lui fait un signe, ralentissant, trottant presque su place. « Un café ? » « Pour bien commencer la journée ? » On peut difficilement résister au charme des Lockhart.

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« Et c'est ainsi qu'au fur et à mesure des années, nous échangeâmes nos rôles. Passant de l'un à l'autre sans prévenir, comme un jeu, changement de personnalité. » Elle tire une dernière fois sur sa cigarette qu'elle vient écraser sur le vieux cendrier posé sur la table de nuit. Un coup d’œil rapide vers le réveille-matin. « Comme tu l'auras remarqué, ceci n'était pas ma vie, mais nos vies. » Elle se lève, ramasse ses sous-vêtements sur le sol qu'elle enfile rapidement. « Et je te prierais d'en sortir rapidement. » Ne prenant pas la peine de zipper sa robe noire elle s'approche de cet homme toujours couché sur ce lit répugnant de cette garçonnière infâme. Cet homme qui avait réussi à tromper sa sœur. « Disparais maintenant, si tu ne veux pas subir la manière forte. » Elle attrape ses affaires et une autre cigarette avant de partir se fondre dans la population de Londres. Aujourd'hui était un jour important, le jour ou elle devenait la tutrice de son ainée. Ébouriffant ce qu'il restait de sa crinière elle s'engouffre dans la première bouche de métro, direction l'aéroport chercher Sara.